
Je suis dans une étape de ma vie, la dernière ou l’avant-dernière, je ne suis pas certaine. Seul l’avenir pourra me confirmer cela.
Aujourd’hui, je pensais à mes enfants. Ils sont tous les deux dans une étape de vie différente.
Mais ce qu’ils traversent me rappellent des moments heureux et moins heureux de ma vie.
Passons donc ces étapes.
On vient au monde, dans mon cas, première née de mes parents, je fus donc en quelque sorte leur cobaye. Mais je ne doute pas que ce fut dans l’amour et dans les meilleures intentions du monde d’être de bons parents. Ils apportaient auprès de moi leurs espoirs et… leurs valeurs.
Puis la famille s’est agrandie, sans méchanceté j’ai dû descendre de mon piédestal et devenir une grande sœur responsable. Ce fut une autre étape de ma vie. J’ai pris mon rôle très au sérieux, peut-être même trop par moment.
Mon enfance s’est passée dans le plaisir et l’amour. Souvent cachée derrière mes parents, et j’ai travaillé fort pour les rendre fiers. J’y ai assez bien réussi mais parfois au détriment de profiter pleinement de mon enfance.
L’adolescence fut plus houleuse, j’ai expérimenté et cherché à dévier de la voie que mes parents m’avaient tracée. J’ai dû leur faire bien de la peine. Et je me suis beaucoup cherché à cette époque. Pleurant sur ma vie de jeune fille, pas tout à fait comme je la voulais. Mes petites misères étaient pourtant bien insignifiantes il me semble maintenant.
Puis vint l’époque de jeune adulte. J’ai cru rencontrer l’homme de ma vie. Mais sa violence et son déséquilibre m’ont amené dans un univers pas très joyeux en général. Heureusement, la venue de mes enfants a égayé cette période.
Me voilà à l’époque de jeune maman. La fatigue me contaminait pour être une parfaite mère mais grosso modo, c’est une époque où les souvenirs sont doux à mon cœur.
L’adolescence de mes enfants m’a pris de surprise, je ne pensais pas me retrouver devant leur affrontement et leur désapprobation de mes projets pour eux. Malgré tout, il y a eu de bons moments, grâce entre autres à un homme qui vint marcher à mes côtés pour leur donner du bonheur.
Puis le nid vide dont tous les parents ont si peur. Moi, j’étais prête à l’affronter surtout que je mettais l’accent sur ma carrière. Une autre période de ma vie remplie de belles rencontres mais aussi de durs labeurs pour gravir les échelons de la réussite.
Mon rôle de grand-maman un peu précoce, à 47 ans je me trouvais bien jeune pour ça. Mais ce rôle m’a fait vivre des moments inoubliables et m’a rempli le cœur de souvenirs merveilleux. Mon rôle s’est perpétué deux autres fois. Quelle chance j’ai eu de voir vivre ma descendance de si belle façon. Une étape de ma vie qui m’a fait prendre conscience de qui j’étais. Enfin, je commençais à trouver mon chemin.
À force d’aider les autres à prendre leur retraite, dans mon rôle professionnel, j’ai commencé à rêver de la mienne. J’y ai mis l’énergie nécessaire et je suis arrivée à la prendre à 57 ans. Je pourrais enfin me consacrer à ce que j’aime vraiment, écrire, lire, chanter. Vivre à mon rythme, avec mon horloge biologique un peu hors-norme. J’en ai profité quelques années.
Puis la maladie s’est installée dans mon foyer. Même si ma santé faisait des petits soubresauts elle-aussi, c’est celle de l’homme qui m’accompagnait depuis plusieurs années qui devint un fardeau. Alors une autre étape s’est passée, celle de proche-aidante. Les jours se sont écoulés un peu à reculons. Je m’en serais bien passé. Mais ce n’était pas sa faute, je me devais de lui donner un coup de main.
Jusqu’au jour où mon corps m’a envoyé des signaux d’alarme qu’il n’en pouvait plus. J’ai dû abdiquer et passer à une autre étape. On a trouvé de l’aide pour lui, mais une vie séparée a dû être nécessaire pour y arriver.
Je me retrouve donc seule avec moi-même. Bien sûr, je demeure une proche-aidante auprès de mon homme, je ne le laisse pas tomber. Mais c’est une étape de vie bien différente de toutes les précédentes. Beaucoup moins d’obligations, plus de libertés pour moi. Et apprendre à vivre seule, c’est un apprentissage de vie que je ne connaissais pas.
Continuer à voguer dans les différents systèmes de notre société, c’est aussi un chemin de vie tortueux.
Je vois ma maman, probablement à sa dernière étape de vie, mais une vie qui n’en finit plus à son goût. Elle se laisse aller car elle attend la finale de cette vie, pourtant remplie de bons souvenirs pour elle-aussi.
En suis-je à ma dernière étape? Je pense que la maladie peut aussi entrer dans ma vie et m’apporter une autre étape de vie, celle-là serait la dernière. Mais ça reste à voir car la vie nous apporte souvent des surprises.
Je regarde donc autour de moi, ceux qui sont à d’autres étapes de vie. Ça me donne un regard plus affectueux, plus compatissants.
Au fond, il n’y a pas d’étapes de vie plus difficile qu’une autre. Chaque étape est un affrontement avec la vie, avec soi-même.
Et on finit tous seul. On naît seul, et on meurt seul, il y a la vie entre les deux. Autant y mettre le plus d’amour possible.
Bien sûr, on se demande si il nous reste 2 ans ou 30 ans. Ma grand-mère maternelle est morte à 101 ans et ma mère continue de vibrer. Alors, la question est légitime: est-ce que j’le mange, le chocolat?
Je choisis de vivre une journée à la fois et d’être heureuse. J’ai fait tout mon possible avec mes enfants et je suis bien heureuse qu’ils soient autonomes.
Je crois que je mérite le repos et la lecture que je m’offre et au diable le reste.