
Le chant a toujours fait partie de ma vie.
Bébé, la voix de ma mère résonnait à mes oreilles comme la plus mélodieuse des musiques lorsqu’elle me berçait pour m’endormir. Plus tard, elle a continué à me captiver. Je me souviens que lorsque je l’entendais, je croyais que c’était un ange qui chantait.
Plus tard, j’ai découvert que mon père avait une très belle voix de basse. Il a assisté avec fébrilité à mes premiers concerts comme choriste. C’est ainsi que j’ai découvert qu’il aimait tant le chant, en me voyant probablement réaliser l’un de ses rêves. J’ai compris sa fierté devant ma petite prestation.
Maman nous a montré à chanter dès notre plus jeune âge. En essuyant la vaisselle qu’elle lavait, chaque soir, elle nous apprenait une chanson. Mon frère et moi avions notre chanson qu’elle nous faisait répéter. C’était « L’hirondelle et le papillon ». Nous l’avons même interprété ensemble à l’école, à la demande de mon professeur de 3e année. Pour l’occasion, mon frère, qui était alors en 2e année, m’a rejoint devant mes copines de classe.
En ce temps-là, la musique était omniprésente dans toutes les familles. C’était naturel de chanter, toutes les occasions s’y prêtaient.
Quand les soirées s’animaient pour célébrer, chacun y allait de sa petite ritournelle, accompagné de musiciens, certains avec un réel talent, d’autres qui jouaient le jeu sans trop de prétentions. Personne ne jugeait.
Vers l’âge de 12 ans, j’ai acheté mon premier disque, un 45 tour! C’était la chanson interprétée par Joël Denis, le Ya-Ya. Une petite chanson simple qu’il faisait bon chanter et danser en même temps. J’avais économisé mes sous longtemps pour pouvoir me l’offrir. La joie que j’éprouvai, lorsque je suis allée le chercher et ai pu enfin le faire jouer sur mon tourne-disque.
Avec ma cousine Gislaine et meilleure amie d’enfance, c’était l’un de nos loisirs préférés et nous formions un tandem chaleureux. Elle avait une voix fantastique qui m’a fait rêver plus d’une fois. Mais elle avait aussi la générosité de me laisser chanter avec elle en harmonie.
J’avais aussi la chance d’avoir une grande cousine, Jocelyne, de quelques années mon aînée, qui m’envoyait ses 45 tours lorsqu’elle n’en voulait plus. Moi, même si les chansons dataient un peu, j’étais ravie. Je les apprenais par cœur et je pouvais ensuite les chanter en me prenant pour une grande chanteuse. En ce temps-là, on ne nous demandait pas de performer.
Il y a eu l’adolescence, où j’écoutais la radio jusque tard dans la nuit et où les chansons mélancoliques, s’appuyaient facilement sur ma vie comme un reflet presque parfait. Je pouvais pleurer toutes les larmes de mon corps, au creux de la nuit, sans trop de bruits pour que personne n’entende ma douleur. C’était comme un baume sur mes souffrances d’adolescente.
Au secondaire, je me suis beaucoup impliquée dans des organisations scolaires. Et j’ai partagé à tous la joie de la musique. Je me souviens d’un café-étudiant que nous avions mis en place. J’étais responsable de la musique. Bon, j’y passais mes goûts musicaux personnels! Disons qu’après un certain temps, plusieurs en avaient un peu assez de Renée Claude, ma chanteuse préférée à l’époque.
J’ai vieilli et j’ai eu des enfants à mon tour. Lorsqu’ils étaient bébé, j’ai trouvé un grand bonheur à leur chanter de belles chansons douces. Leur regard empreint d’amour me disait clairement qu’ils appréciaient à leur tour. Je n’ai pas manqué de leur montrer à chanter le plus tôt possible. Les chansons qui m’avaient vu grandir, ont donc vu grandir mes enfants aussi.
Chez mes parents, un des grands plaisirs des petits-enfants a été ces soirées autour du feu où chaque enfant avait le droit, à tour de rôle, de monter sur une buche, improvisée en scène, pour y aller de son savoir-faire musical. Mes enfants ont gardé un souvenir empreint de mille joies de ces moments-là!
Comble de bonheur, mes deux enfants ont persévéré dans la musique. Ils sont devenus des musiciens accomplis. Ils sont tous les deux de bons chanteurs, ma fille a un talent particulier qui me fait frissonner de joie quand elle décide de l’utiliser pour me faire plaisir. Je me souviens d’une belle fête organisée pour mes 50 ans, par elle, et où elle m’a offert le plus beau des cadeaux, deux chansons justes pour moi, accompagnée par son frère au piano pour l’une et au trombone (avec l’orchestre) pour l’autre.
Avec la venue de mes petites-filles, j’ai récidivé la chansonnette. Leur chanter quelques notes semble encore les ravir, j’ai vu leurs yeux pétiller de bonheur.
Aujourd’hui, le plaisir de chanter s’est perdu avec les traditions familiales. Les soupers et les soirées se passent dans des discussions souvent interminables et dangereusement troublantes parfois, surtout s’il est question de politique.
Il y a quelques années, j’ai amené à une soirée du jour de l’an, un jeu de karaoké, mes frères et ma sœur ont embarqué avec entrain dans ce jeu.
Le karaoké semble l’outil formidable pour renouer avec le plaisir de chanter. Les rencontres amicales devraient toutes en être dotées. Même si ça demande quelques ajustements pour plaire à toutes les générations.
Lorsque mon conjoint est entré dans ma vie et a rejoint mon quotidien avec ma petite famille, il a été agréablement surpris d’entendre ce plaisir de chanter. C’est grâce à lui, que j’ai pris confiance en moi là-dessus et avec son appui, j’ai rejoint une chorale. Ce qui a compensé mon manque de chant dans la vie.
Lorsque je chante, malgré un bien mince filet de voix, je recharge ma batterie. Je sens en moi une énergie nouvelle qui vient éveiller tous mes sens. En plus de nous donner des techniques de respiration qui sont un grand atout en vieillissant. Le chant a un pouvoir de guérison, un pouvoir de séduction, et tous peuvent en profiter, j’en suis persuadée.
Avec le vieillissement, je trouve important d’ajouter de la couleur à nos vies. Même si nos cordes vocales semblent un peu s’engourdir et nous donner souvent une voix plus basse et plus rauque, elles restent un atout formidable pour ensoleiller nos journées. Ne dit-on pas de quelqu’un qui fredonne qu’il est heureux!
Je souhaite que les futures générations retrouvent le bonheur de partager, avec les leurs, l’utilisation de cet appendice dont la nature nous a si généreusement doté! On peut leur donner l’exemple, c’est un bon début.
Et à l’aube de cet automne qui s’installe, c’est le temps d’intégrer les groupes de chant. Il y en a pour tous les goûts et toutes les voix.
Alors chantez, ne vous arrêtez pas et le bonheur fera partie de votre vie malgré tous les aléas des jours sombres du vieillissement.
Les chansons que ma grand-maman chantaient me reviennent souvent. Mon papa écoutait à la radio de l’opéra et de la musique tous les samedis et dimanches après-midi . Merci Liette de m’avoir rappeler ces moments-là.